Lettre ouverte à une jeune fille

Mademoiselle,

Voilà maintenant plusieurs mois que nous nous croisons régulièrement, et à chaque occasion je diffère le moment où j'aurai le courage de vous aborder. Si je le fais ce soir, c'est que je n'y tiens plus. Le trouble que vous avez jeté sur moi, qui parviens d'ordinaire si bien à modérer mes élans, m'interdit toute forme de retenue.

Mais qui suis-je pour espérer que vous serez sensible à ma démarche ? Nous vivons si près l'un de l'autre, pourtant vous n'avez jamais eu un regard pour moi, encore moins un sourire. Sans doute ne connaissez-vous même pas mon prénom.

Je ne me fais guère d'illusions sur le crédit que vous m'accorderez, tant il est vrai que vous êtes très entourée, principalement par ces jeunes gens de votre âge qui se succèdent à votre bras, fiers et décidés, virils et protecteurs. Je dois reconnaître que vous formez des couples parfaitement assortis. Vous incarnez ensemble toute l'insouciance de la jeunesse, le sentiment immuable que rien n'est grave, que nul ne peut vous atteindre, que la vie est une liberté permanente pour peu qu'on choisisse de ne jamais se soumettre à quiconque.

Vos jours et vos nuits sont peuplés de lumières et peuplés de fous, vous êtes dernière à rester debout. Votre désinvolture, le détachement que vous avez sur les choses, cette désarmante nonchalance avec laquelle vous refusez la norme, m'amènent à songer que nos existences n'auraient jamais dû être mêlées.

Et pourtant je viens vous trouver ce soir, je m'adresse à vous sur ce ton solennel dans lequel, croyez-le bien, je n'imaginais pas de devoir me confondre.

Il faut que vous m'écoutiez, Mademoiselle.

Parce que Mariah Carey à fond les ballons à quatre heures du mat', les dealers de shit en Audi A3 tunée qui défilent derrière ta porte, tes mégots déversés sur mon balcon, tes saloperies de talons aiguilles sur le carrelage de ta salle de bains, les engueulades avec tes copines, ta soeur, ta mère et tes ex dans la cage d'escalier, les étrons de ta crevure de clebs puant sur mon paillasson, ton scooter scotché devant les boîtes aux lettres... ça commence à me les briser sérieux.

Il faut te le dire comment, que tu pourris la vie de tout l'immeuble, connasse ?

Comments

[agirlnextdoor]

Je suis desolee monsieur, je ferai attention la prochaine fois.

C'est vous qui habitez en dessous? Et bien je profite de l'occasion pour savoir s'il est possible que votre enfant fasse un mpeu moins de bruit le samedi matin.
Si vous cherchez une baby sit, d'ailleurs, je suis un peu en rade de thunes, et je dois pas mal d'argent ces derniers temps.

Sans rancune, hein

[lafemmedessteppe]

Très joli déroulement ! Excellent texte qui m'a pris par surprise !

Imprime la lettre, mets-la dans la boîte aux lettres. Ou mieux ? Ecris-la selon la vieille méthode de la lettre anonyme, avec des lettres découpées dans un journal ;-)

Ma voisine à moi nous a collés au tribunal... mais bon, elle nous laisse dormir, quand même.

[Norzem]

jolie chute!
chapeau l'artiste!

et casse-toi connasse de voisine!

[SuperPionne]

J'adoooooooooooore :D
Je pensais à une déclaration, moi, au début et ... PAN. Pas du tout :)

Le coup des talons, bordel ca m'enerve ! je pourrais tuer ma voisine du dessus et ses 2 filles pour ca ! :)

[Seer]

Mouarf.
Pour du non-vécu, c'est criant de vérité.
Pour moi c'est du passé aussi... Avant j'habitais au deuxième d'une rue très bruyante, des fois c'était à balancer une bouteille sur les gueulards, maintenant un petit appart de couple d'une rue calme, au premier avec une boutique en dessous, donc pas peur de déranger le voisin du dessous la nuit (inexistant), et un vieux voisin discret au-dessus, à l'exception, peut-être, des soirs de match de foot où on entend plus de bruit.
Hein quoi la coupe du Monde ?
Et m.... :(