On the road again
Ceux d'entre vous qui me lisent depuis le début s'en seront aperçus par eux-mêmes, sinon pour les nouveaux, l'info du jour est la suivante : j'aime l'automobile. Et surtout j'aime conduire. Par préférence à tout autre moyen de locomotion. Ne me demandez pas pourquoi, c'est comme ça.
Inscrit dans mes gènes, au plus profond.
Et indélébile.
C'est bien simple, je considère que ma vie a réellement débuté le jour où j'ai passé mon permis. Evidemment, je n'imaginais pas que vingt ans plus tard, on ferait tout pour m'en dégoûter, qu'on me pointerait du doigt façon "ouh le méchant expulseur de CO² qui détruit la planète", qu'on ferait de moi cette vache à lait (soit dit en passant tellement utile à nos élites lorsqu'elles veulent financer leurs grands projets verts).
Mais non.
Je n'en veux ni à monsieur Delanoë d'avoir transformé Paris en manège pour bobos, ni au petit Nicolas d'avoir placé des boîtes à images tous les cent mètres. Je fais de la résistance, mais je joue le jeu. J'achète des voitures neuves équipées de filtres à particules, et si elles n'étaient pas aussi laides que chères, j'investirais sans hésiter dans une hybride, voire une électrique. Sur autoroute, je ne cale mon régulateur qu'aux vitesses limites autorisées, et en ville je fais le maximum pour me faire oublier face aux piétons. Rebelle oui, pas hors la loi. Mon seul but : prolonger un peu le plaisir, si amoindri soit-il...
Ce week-end, pourtant, j'ai bien senti que mes heures de bien-être au volant étaient comptées. 500 kilomètres ont suffi à ma prise de conscience brutale, et malheureusement irrémédiable. Ce qui va me dégoûter de conduire, ce n'est pas de lutter contre le sommeil à 110 sur une 4 voies. Pas de devoir acquitter un péage pour atteindre mes magasins préférés en ville. Ce qui va tuer mon envie, c'est l'omniprésence d'une race de conducteurs en pleine prolifération : les boulets.
Je ne vais pas vous faire ici l'inventaire des comportements aussi pénibles qu'irresponsables que l'être humain est capable d'endosser lorsqu'il est derrière un pare-brise. Mais quand même. C'est à se demander si les nouvelles réglementations ne les ont pas rendus encore plus cons.
Parce que des crétins pour oublier qu'en France, on roule à droite, il y en a toujours eu. Seulement voilà, aujourd'hui, bien disciplinés à jouer les escargots par crainte du flash, bien calés sur la voie du milieu alors qu'il n'y a personne à dépasser, ils obligent ceux qui sont plus rapides à opérer d'incessants zig-zags d'un parapet à l'autre. Et pour ceux que les zig-zags en question rebuteraient, qu'à cela ne tienne, ils doublent par la droite et se rabattent ensuite ! Vous avez dit interdit, vous avez dit dangereux ? Bah je comprends pas, monsieur l'agent, j'allais pas vite...
Pas vite mais jamais au même rythme, ça aussi, c'est exaspérant. Je ne compte plus les abrutis incapables de garder une vitesse constante, que tu vois grossir dans tes rétroviseurs après les avoir dépassés 3 kilomètres plus tôt, et qui vont profiter d'une descente pour t'enrhumer d'un seul coup, venir se coller juste devant tes roues... et ralentir parce que ça remonte.
A moins que... mais non, bien entendu, c'est juste qu'un panneau annonçant un radar a été aperçu. Donc on pile, debout sur les freins, pour passer de 145 à 129. Tellement rigolo...
Il faut croire aussi que le parc automobile français est vraiment mal en point. Sur la majorité des voitures que je suis, le clignotant est en panne. Ils ne vérifient pas ça, au contrôle technique ?
Il fut une époque où je m'énervais, envoyais des appels de phare, quand ce n'était pas un coup de klaxon ou un geste de la main. J'y ai renoncé à la suite d'une réaction complètement surréaliste d'un excité du bocal qui, non content d'avoir déboîté sans regarder, n'a rien trouvé de mieux que de me brandir une batte de base-ball par la vitre en gueulant "je t'attends au péage" !
Effectivement, j'aurais dû m'en douter. Plus c'est con, plus c'est méchant. Les gens sont déjà prêts à s'entretuer pour une place de parking...
Bref, je ne gueule plus. J'intériorise. Et j'attends que les hasards de la circulation me permettent de découvrir, quelque temps plus tard, à quoi ressemblent mes boulets du jour. Et là, croyez-moi si vous voulez mais... tous, sans exception, ont bien la gueule de l'emploi. Non non, ne comptez pas sur moi pour vous dire qu'il s'agit toujours d'une femme, et de préférence blonde. Absolument pas. Il y en a pour tous les goûts et pour tous les âges. Mais chacun dans son genre est un cas d'école. Des mains crispées sur le volant, un siège avancé au maximum, le portable scotché à l'oreille... J'en ai vu en train de lire le journal, de se maquiller, de manger une barquette de carottes rapées.
Eh oui. Forcément. Ceci explique cela. En matière de conduite, à défaut d'une justice, il y a toujours une logique. Quand je pense que ce sont ces gens-là qui vont me faire renoncer à la voiture...